Fabienne MOTTO EI
Psychologue à Meyzieu
Fabienne MOTTO EI
Psychologue à Meyzieu

Vers une transformation-rencontre de soi en profondeur


Dans une perspective de transmission, je réalise actuellement une série d’interviews auprès de personnes rencontrées durant mon parcours de formation dans l'Approche Centrée sur la Personne (ACP). Certaines ont été certifiées comme psychopraticiennes dans l'ACP, d'autres non. Marie-Laure Leprette est l’une d’entre elles. Elle anime des ateliers d’écriture et des ateliers de peinture d’icônes à Penne d’Agenais dans le Lot-et-Garonne. Elle a accepté de témoigner sur ce que l’ACP représente pour elle, sa rencontre avec l’approche, ce qu’elle a pu ou continue de lui apporter.

Les premiers contacts avec l'ACP et ses ouvertures

Comment s'est passée ta rencontre avec l'Approche ?

J’ai rencontré l’ACP avec D. Bénaquin thérapeute ACP à Meudon. Elle a participé à la création de l’association telle qu’on la connaît en France. Elle a participé à un groupe de  dialogue interreligieux que j’animais. Quand Denise parlait, j’étais étonnée de ce qu’elle disait et de la façon dont elle renvoyait la chose aux personnes (dire leur ressenti). Je n’avais jamais vu cela. Qui est cette femme ?! Comme c’était intéressant sa façon d’intervenir ! Quand j’ai vu Denise, je me suis dit, « Mais, qui est cette personne ? » « C’est quoi son métier ? » et j’avais justement besoin de parler à quelqu’un à l’époque. Je lui ai demandé si elle pouvait m’accueillir en tant que thérapeute. J’ai été mise en confiance par son respect et son non jugement. Elle arrivait à accueillir et à faire émerger une parole vraie « Mais pour toi, qu’est-ce que cela représente ? », « Toi, comment tu ressens cela ? », je n’avais jamais vu cela. J’ai été interpellée dès la première rencontre. J’ai entamé une psychothérapie avec elle. Elle m’a beaucoup aidée à accueillir plus intérieurement les situations difficiles que je traversais en y mettant du positif, elle m’a aidée à ne pas avoir peur, à accueillir positivement la richesse des différences plutôt que de me laisser prendre par le douloureux ou le pathologique. Son approche a fonctionné avec moi. J’étais psychologue clinicienne, formée à la psychiatrie et j’ai aimé cette approche ACP loin de ce que j’avais appris et des étiquettes psycho pathologiques.

Grâce à son regard, tu as pu ouvrir le tien sur ce que tu traversais ?

Tout à fait. Cela m’a beaucoup aidée. Regard bienveillant et accueillant des différences et la confiance en la capacité des êtres à se développer. Sa formation était très différente de la mienne. On m’avait appris la distance, pas d’implication, la neutralité bienveillante. J’avais au cours de ma formation et de mon parcours fait une thérapie psychanalytique et une psychanalyse sans vraiment avoir l’impression de changer en profondeur. Avec elle, j’ai bougé, cela m’a aidée à développer et expérimenter la confiance en la capacité de l’humain à grandir, à trouver son propre chemin. J’animais à l’époque des ateliers de sculpture dans mon atelier d’artiste car je suis également sculptrice et peintre. J’avais arrêté de travailler comme psychologue en crèches, PMI, en centre pour enfants handicapés. J’étais mieux dans mes ateliers. Mais je gardais en tête comme idéal de devenir un jour psychothérapeute, comme s’il me fallait soigner, réparer, travailler dans le métier de thérapeute. C’était ce qu’il y avait de mieux à mes yeux. J’ai parlé avec Denise de la formation ACP. Dans le cadre de mes études, je n’avais pas vraiment appris à écouter et cela me manquait.

Je me suis inscrite à la formation ACP (en 2010), sur trois ans. Cela m’a aidée à mieux accueillir des difficultés que je traversais dans ma vie à l’époque. J’ai été transformée par cette formation et l’accompagnement exceptionnel des formateurs et c’était très difficile en même temps pour moi. J’ai été très remuée. Je venais apprendre à écouter l’autre et la formation m’a renvoyée qu’il fallait d’abord s’écouter soi-même et je ne savais pas comment aller à l’intérieur de moi ! J’avais eu une éducation rigide « On ne s’écoute pas ». Je n’arrivais pas à savoir où j’étais. C’était très difficile d’ouvrir la porte. Je l’ai fait peu à peu. J’avais très peur qu’elle se referme. Elle se refermait et se rouvrait comme un cœur qui bat. Peu à peu j’ai appris que je pouvais ouvrir et fermer, ce qui me protégeait. Progressivement, j’ai été plus aux commandes, plus capable de me centrer sur moi pour savoir ce que je ressentais. J’ai ainsi été transformée, dans les groupes de rencontre en particulier, qui étaient comme des espèces de labos des relations. J’ai pu mieux comprendre comment se vivaient mes relations à l’extérieur, comment je pouvais dire les choses, ou être blessée parfois. Je ne savais pas bien gérer les conflits et me défendre. Peu à peu, j’ai appris. Je suis devenue une nouvelle femme, avec une capacité nouvelle à parler, à m’opposer, à me dresser, à dire ce qui était juste pour moi. Au cours de la formation et de l’accompagnement que j’ai reçus je me suis sentie réparée, dans un tissage de mes fondations, très fort, doux, émouvant.

J’ai vécu d’autres choses fondatrices avec l’ACP. J’ai participé à un séminaire sur la colère et à un autre groupe sur la naissance. Cette colère que j’ai pu contacter expérientiellement m’a mise en lien avec ma puissance, ma capacité à dire. Maintenant, je peux si besoin puiser dans cette énergie, dire, me dresser et désamorcer plus vite les conflits. Cela m’a donné beaucoup de force.  Je me sens plus vivante, centrée sur moi, capable d’exprimer ce que je ressens.

Mais malgré tout, à travers tout ce que j’expérimentais, je me suis rendu compte avec beaucoup de tristesse et de surprise que je n’avais pas la place intérieure pour écouter les autres toute la journée dans ce métier de thérapeute. Cela venait à l’encontre de mon idéal mais cela est venu me dire la juste place de là où j’étais bien, dans mes ateliers, dans ma création, ni mieux ni moins bien que d’être thérapeute. La médiation de l’art me convient et apporte de l’équilibre et de la joie créative aux autres, sans aller dans les grandes profondeurs. C’était la bonne place pour moi et là où j’étais bien. J’y étais plus naturelle, plus spontanée et c’est là où j’apportais beaucoup aux autres. C’était très important pour moi d’être en lien avec les autres et de les aider dans des processus de devenir. Mon travail de thérapeute n’était pas à l’époque possible mais via les médiations artistiques j’apportais aux gens et j’étais à ma place.

Trouver sa juste place sur son chemin

Tu veux dire que cette position d'accompagnement de l'autre via des médiations artistiques te permettait de faire l'expérience d'être à ta juste place même si une part de toi visait autre chose ?

Tout à fait. Cette formation m’a permis de mettre les choses à leur place. Je m’imposais un truc qui n’était pas forcément juste. Cela a donné beaucoup de valeur à ce que je faisais aussi. J’ai écrit un article dans le Trait d’Union (périodique). J’avais interrogé mes élèves sur les apports des ateliers pour eux. Un gamin d’environ 11 ans, qui a participé aux ateliers de 6 à 12 ans, m’a dit « j’aime bien venir parce que tu nous aides à faire tout seul », j’ai adoré cette expression. Chacun trouvait son propre chemin via l’accompagnement. Ils s’appropriaient complètement leur œuvre,  j’intervenais le moins possible tout en étant le plus soutenante possible de leur processus. Par la suite j’ai déménagé et depuis trois ans, j’ai remis en route un atelier (peinture d’icônes) dans notre nouveau lieu de vie dans le sud-ouest. C’est un lieu où les gens viennent se poser dans un cheminement spirituel, une forme de méditation, de prière, dans le respect de ce que souhaite chacun, d’une lenteur, d’une connexion intérieure. Les personnes parlent très peu, dans l’espace d’un travail très technique mais relié spirituellement qui essaie d’être harmonieux. Une montée des lumières par la traversée symbolique des ténèbres. Cela a du sens pour moi dans l’accompagnement des personnes, dans ce qu’en disent les personnes (c’est un moment très important pour elles).

Voilà un peu mon expérience de l’ACP. Et c’est vraiment super, formidable d’avoir pu vivre tout cela ! Je suis un peu triste de ne pas pouvoir continuer. Quand je retourne en séminaire, c’est comme retrouver une famille, mais j’y suis très peu. Je ne participe pas à des groupes de rencontre, je ne suis pas thérapeute.

Une part de toi est triste ?

En fait non. Je suis mieux dans le travail avec des médiations et dans le travail artistique. Je peins des oiseaux, des icônes, une façon pour moi de m’exprimer et de traverser intérieurement des tas de choses.

Comme si les traits tracés artistiquement t'aidaient à faire un chemin à l'intérieur ?

Oui. Ce que je vis passe inconsciemment à l’extérieur. Je le ressens, cela a du sens et cela me parle de moi et je le vois après. J’ai fait une série d’oiseaux, les modèles choisis viennent dire quelque chose de moi. Après coup, il y a comme un miroir. Je suis centrée sur moi par l’aide de la médiation. Toujours. Le dernier oiseau que j’ai fait est un aigle des Philippines, avec une tête incroyable, très puissant, en colère ou pas, mais il ne faut pas l’emmerder ! Je suis très contente de l’avoir fait. Il n’est pas rigolo du tout mais est puissant. C’est bon pour moi d’avoir fait cette puissance, cette force. C’est en lien avec ce que j’ai contacté avec la colère et mon énergie. Ce sont des bouts de facettes qui s’expriment dans mon art. C’était pareil avec la sculpture. Cela passe beaucoup par la création pour moi. Là où je prends vraiment du plaisir, est d’accueillir des personnes et de transmettre, comme une accoucheuse.

Je suis avec tout cela… ce que l’on a vécu ensemble durant la formation. T’entendre me remet en arrière… Le temps est aboli. Je suis avec ce que cela a eu de fondateur.

Quand tu me poses des questions dans notre entretien et tu rebondis sur ce que je dis Fabienne en tant que thérapeute, je pense que tes clients sont très bien accompagnés et je me dis « Et toi si tu faisais ce travail ? »

Cette question reste en toi ? Encore comme un idéal ou quelque chose qui aurait du sens ?

Cela aurait du sens et je vois la puissance du truc mais je n’ai toujours pas la place intérieure, mon esprit s’échappe. J’aurais bien aimé mais quand je me repose la question je vois que ce n’est pas là où je peux être bien avec moi et avec l’autre. C’est bien de voir ça. C’est un long chemin tout cela. Même si je ne travaille pas comme thérapeute, je me sens nourrie, transformée et habitée par cette Approche, sa philosophie, ses principes, que je fais entièrement miens.

Quand tu parlais de t’échapper, j’avais l’image de l’oiseau…

C’est peut-être pour ça que j’en peins, la liberté… La plupart sont des portraits d’oiseaux, ils sont très anthropomorphiques. Via ces oiseaux, ce qui me touche est la beauté du monde, c’est précieux. Magnifier les oiseaux et ouvrir le regard sur eux qui nous regardent. Je suis très sensible à la beauté de la création, je m’en émerveille, je suis tellement triste de ce que l’on en fait. Derrière cela, donner à voir comme chacun de ces animaux est sacré. Chaque être est magnifique, est unique, très précieux et à chérir, dans la lumière. C’est très très important pour moi, de dire, de ressentir, de donner à voir combien chacun est unique et précieux. C’est très très fort pour moi. Et ça a du sens. Je peins des icônes (c’est très spirituel), je fais une galerie de portraits d’oiseaux et je développe ma vie à côté, je chante. L’art et la création sont un chemin d’expression fondamental pour moi.

Merci beaucoup Marie-Laure !


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